Les producteurs de musique maintiennent leur logique répressive
La SCPP, présidée par Pascal Nègre, n’a pas l’intention en 2007 de cesser de poursuivre les adeptes du peer-to-peer. Elle s’en prend également aux serveurs P2P et aux sites de téléchargement étrangers qui ne respectent pas les ayants droit.
Un déjeuner avec Pascal Nègre est toujours un moment truculent: la petite réunion d'avant-Midem organisée par la SCPP (Société civile des producteurs phonographiques), qu'il préside, n'a pas échappé à la règle. En grande forme, le patron d'Universal Music est revenu, à coups de petites phrases bien senties, sur les événements de l'année 2006.
Et le discours n'évolue guère d'une année à l'autre: «Tant que cela sera très facile de télécharger un titre gratuitement sans aucun risque, il y aura toujours un problème». À l'entendre, les ventes de CD continuent à baisser, sans être compensées par les ventes en ligne, à cause des pirates. Pourtant «nous avons mis à disposition [des plates-formes légales] tous nos catalogues». Mais rien n'y fait, martèle Nègre, il faut s'en prendre à la source du mal, le pirate. «Pas avec de la prison, bien sûr, mais avec des amendes.»
Pourtant, les producteurs disposent d'un nouvel arsenal pour défendre leur droit face à la contrefaçon: la loi Dadvsi, qui a accaparé une grande partie du calendrier parlementaire en 2006. Un texte que de nombreux observateurs estiment être grandement en faveur des ayants droit que sont les producteurs de musique. Toutefois, rappelle Pascal Nègre, il a fallu attendre six mois pour que paraisse le premier décret, et l'on attend encore celui instituant l'Autorité de régulation des mesures techniques.
De plus le texte n'a pas instauré de riposte graduée, qui aurait permis aux ayants droit de faire parvenir automatiquement aux pirates pris sur le fait, des messages d'avertissement, et de mettre en place une gradation des sanctions, poursuit le patron d'Universal. Les autres tentatives des producteurs en matière d'envois automatisés sont pour l'instant bloquées par la Cnil (commission nationale de l'informatique et des libertés), qui a refusé de donner son aval à un projet de «radar automatique» installé sur les réseaux peer-to-peer. C'est le Conseil d'Etat qui devra trancher cette affaire courant 2007.
Des serveurs EDonkey fermés
Mais la SCPP n'est pas privée de tout moyen de répression: pour preuve la dizaine de condamnations qu'elle a obtenue depuis septembre 2006, contre des internautes accusés de télécharger et de mettre illégalement des fichiers musicaux à dispostion. Avec, à chaque fois, une amende et des dommages et intérêts de plusieurs centaines ou milliers d'euros à payer à la SCPP.
La dernière décision en date, celle du tribunal de Bobigny, qui a relaxé un internaute pour vice de procédure, n'inquiète pas outre mesure la société. Elle affirme que ses relevés d'infraction ont déjà tous été validés par la justice, et qu'ils ne nécessitent pas d'autorisation spéciale de la Cnil, garantit Marc Guez, le directeur général de la SCPP.
Par ailleurs, elle continue à réclamer environ une dizaine de coupures d'accès internet chaque mois.
L'organisme vient également d'envoyer 29 mises en demeure à des personnes exploitant en France des serveurs sur les réseaux peer-to-peer EDonkey et DirectConnect. Ces serveurs permettaient de faire transiter «plus de 23 millions de fichiers contrefaits», affirme la SCPP. Elle exigeait de leur propriétaire un filtrage, mais seize d'entre eux, ont préféré mettre la clé sous la porte.
L'objectif, avec cette démarche, est clair: «Em... bêter au maximum ceux qui téléchargent illégalement», sourit Pascal Nègre. Car même si les serveurs sont transférés à l'étranger, cela ralentira les téléchargements en France, poursuit Marc Guez.
Dernière initiative, dont le résultat est certainement plus aléatoire: la SCPP a porté plainte contre les sociétés russes Media Services et X-Media Limited, qui exploitent les sites Allofmp3.com et Mp3Sugar.com. Ce sont des sites de téléchargement payant, qui proposent titres et albums à prix cassés, sans aucune autorisation des ayants droit. La plainte a été déposée devant le tribunal de grande instance de Nanterre et transmise en Russie.
Estelle Dumout, ZDNet France, 11 janvier 2007
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